
En ce début décembre, le Cercle Aliénor nous a permis de découvrir la voix poétique d'Armand Robin au travers de la présentation de Françoise Morvan et de la lecture de poèmes en russe par André Markowicz.
Françoise Morvan, agrégée et docteur ès lettres, auteur d'une thèse sur André Robin et de nombreux ouvrages et traductions, nous a donc invités à suivre l'itinéraire de ce poète qui "se perd" au fur et à mesure de ses expériences d'écriture. Elle a tenté de nous dresser le portrait le plus vraisemblable, au plus proche de la vie et des oeuvres de l'auteur, s'opposant parfois à une vision consensuelle de celui-ci. En effet Armand Robin est présenté comme un poète maudit dont il possède en partie tous les attributs (de tendance anarchiste il meurt dans un commissariat). En réalité nous avons découvert un homme de son siècle dont les engagements varient et évoluent en fonction de ses rencontres et des évènements. S'il écrit dans le Libertaire, il n'hésite pas à renvoyer dos à dos tous les types de régimes qui conduisent au totalitarisme. Ainsi son voyage en URSS en 1933 marque un tournant dans sa pensée. Françoise Morvan souligne donc ses engagements mouvants, comme le prouvent ses liens avec le gouvernement de Vichy puisqu'il travaille au ministère de l'information et rédige des "bulletins d'écoute". Il peut publier ainsi en 1942 son premier et unique roman, Le temps qu'il fait, qui s'ancre dans sa Bretagne natale. Après la guerre, catalogué comme collabo, il se met en marge puis s'inscrit à la Fédération Anarchiste et publie une étude sur la propagande, La fausse parole en 1953.
Passionné par les langues étrangères il se tourne vers la traduction notamment pour la Radio dans l'émission Poésie sans passeport. Il trame ses traductions de tout un travail musical qui le conduit souvent à une réécriture partielle des textes.
Afin de mieux comprendre ses traductions, Françoise Morvan s'est adressée à André Markowicz qui a honoré de sa présence le Cercle et nous a proposé une lecture commentée de poèmes russes et des traductions.
Enfin Françoise Morvan souligne l'assèchement progressif de la voix poétique propre d'Armand Robin. De façon curieuse, elle souligne que cet assèchement intervient alors que le poète étudie l'arabe - il étudiera près de 36 langues-, la langue du désert. Sa poésie est celle de la perdition et son auteur se trouve comme dépersonnalisé.
Bien loin de toute récupération partisane Françoise Morvan nous a présenté un poète, celui qui n'était personne et qui "fut pris en flagrant délit de vie", bien malgré lui?
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